"La loi n'empêche pas le littoral de croître" par le Préfet du 56

Publié le par Trébeurden Environnement

Bonjour,

 

Le Préfet du Morbihan publie une très bonne analyse ci-dessous ; en effet, la loi n'a pas pour but de sanctuariser le littoral mais de le protéger, ce qui a toujours été notre position. Cet article est un appel à la réflexion à tous les élus qui en ce moment souhaitent voir la loi littoral 'être assouplie" c'est-à-dire pouvoir construire partout car les élus n'ont pas d'autres idées pour le développement de leur commune.

Alain Bidal

«La loi n'empêche pas le littoral de croître »
François Philizot, préfet du Morbihan.
François Philizot, préfet du Morbihan.

Le préfet estime que l'application plus rigoureuse de la loi met en évidence l'intérêt d'une politique foncière volontariste de densification et de logement social.

Entretien

La loi Littoral est-elle parvenue à contenir l'urbanisation en Morbihan ?

Comme ailleurs, elle a mis un coup de frein à des pratiques qui risquaient de conduire à un mitage des espaces littoraux avec des constructions un peu partout. Ce qui se serait traduit par une dégradation des paysages et un gaspillage du foncier. Je suis aussi persuadé qu'elle a eu des effets bénéfiques sur les modes d'urbanisation du littoral.

Que répondez-vous à ceux qui lui reprochent d'entraver le développement des communes ?

C'est objectivement faux. Sur la plupart des cantons littoraux du Morbihan (hormis Quiberon et Belle-Ile), on a des taux de croissance démographique qui vont d'1,5 % à 3 % par an (moyenne départementale : 1 %). Entre 1999 et 2007, Erdeven a gagné 30 % d'habitants, Brech est passé de 4500 à 6000... Et ce en dépit du fait qu'on applique de plus en plus précisément la loi depuis une grosse dizaine d'années. Cela ne veut pas dire qu'elle n'est pas compliquée à mettre en oeuvre. Il est parfois difficile à expliquer que cela fonctionne sous le contrôle du juge, la loi ne disant pas tout.

Pour certains acteurs confrontés aux dures problématiques littorales (pression foncière...), la loi ne sert-elle pas de bouc émissaire ?

C'est parfois un bouc émissaire facile face à des problématiques à l'évidence complexes. Cette loi oblige à avoir une appréciation beaucoup plus fine des espaces urbanisables. Et si l'on veut éviter une ségrégation spatiale liée au prix des terrains et des habitations, il faut une politique très volontariste en matière foncière, en matière de densification et de logement social. C'est l'application avec de plus en plus de rigueur de la loi qui a fait découvrir ces enjeux.

Le caractère découpé du rivage morbihannais amène à appliquer la loi dans des communes en retrait de la côte, cela vous semble-t-il justifié ?

On ne peut pas lutter contre la géographie et transformer, du jour au lendemain, la délimitation de ce qui est la terre et ce qui est la mer. Le critère de base, c'est le fait d'être soumis aux marées. Qu'on soit à 1 km ou à plusieurs kilomètres de la côte, il n'y a pas de distinction. C'est le cas de hameaux qui sont en pleine campagne mais restent soumis à la loi. Cela impose un effort de pédagogie encore plus important. Je comprends que ça ne soit pas simple à expliquer mais de là à dire que ça bloque tout...

Doit-on envisager une approche spécifique pour les îles ?

Il serait illusoire de penser changer la loi pour les îles. Elle ne fait pas de distinction entre territoires insulaire et continental. Les formes urbaines ne sont d'ailleurs pas les mêmes dans toutes les îles (habitat plutôt groupé à Houat et Hoedic, plus disséminé à Groix et Belle-Ile).

Il est essentiel d'appliquer les règles de la même façon sur les quatre communes de cette dernière île. J'ai demandé à mes services de réfléchir à une grille de lecture de ce territoire et j'ai prévu de rencontrer les quatre maires début 2011. Ils sont en train de mettre en place leurs Plu, c'est le moment de construire une lecture commune entre l'État et les quatre communes.

Disposez-vous des moyens nécessaires au contrôle de la légalité des 7 500 permis de construire délivrés annuellement ?

Non. Le contrôle est ciblé sur les dossiers qui nous paraissent les plus importants : opérations groupées (lotissements), les communes les plus compliquées à contentieux multiples, celles qui ont les documents d'urbanisme les plus anciens et les sites remarquables les plus fragiles. Une proportion de permis de l'ordre de 5 % fait l'objet d'un contrôle très détaillé.

Le cas échéant, on demande le retrait du permis à l'amiable. Dans la plupart des cas, le maire le retire. Sinon, on va au tribunal administratif. Chaque année, on défère une dizaine d'actes, relatifs à la loi Littoral surtout. On gagne en général.

Si le tribunal prononçait la démolition d'un immeuble construit illégalement, iriez-vous jusqu'à faire exécuter la décision comme l'a fait l'un de vos prédécesseurs ?

Cela fait partie de mes responsabilités. J'ai déjà fait exécuter de tels jugements.

En Finistère, j'avais engagé une procédure avant de quitter le département. Il faut le faire - c'est indispensable - dans le respect desformes juridiques et des personnes.

 Ouest-France  

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